Histoire du lycée Arago: doit-on remercier les jésuites ?

Témoignage de Jean-Marie Philibert

Histoire du lycée Arago: doit-on remercier les jésuites ?

Entre tradition et modernité,

Entre l’élitisme des jésuites et ceux qui prônent la démocratisation,

Enfin l’inclusion dans un monde difficile,

Une école pour les notables peut-elle devenir l’école du peuple ?

Introduction

Je souhaite débuter par une anecdote remontant à 1977-1978, période où l’Inspection d’Académie et le Rectorat cherchaient à convaincre enseignants, parents et élèves de la fermeture du lycée Al Sol et son transfert vers Lurçat et Arago : lors d’une réunion avec des professeurs d’Al Sol, l’Inspecteur d’Académie a avancé un argument qu’il croyait pertinent : « En intégrant Arago, vous contribuerez à désaristocratiser cet établissement qui en a grand besoin. » Aristocratique, Arago ? Peut-être bourgeois selon l’avis des Perpignanais de l’époque, nous, les provinciaux, à l’assaut d’une bastille locale. Cette histoire d’un lycée pour une élite bourgeoise doit être considérée, comme de nombreux lycées de garçons des grandes villes : la division sociale ne s’arrête jamais à la porte des établissements scolaires.

La version officielle de l’histoire du Lycée Arago commence en 1808 avec l’instauration d’un collège communal, résultat de la politique scolaire du premier Empire. La commune avait souhaité un lycée, comme dans d’autres villes, mais cela ne s’est pas concrétisé ici. Nous y reviendrons pour discuter de ce raté initial dont l’établissement a longtemps porté les stigmates. Il est également essentiel de noter que 1808 ne représente pas pour l’établissement un départ ex nihilo. Un établissement scolaire existait déjà à cet emplacement, qui perdure encore ; son histoire, complexe et riche, permet de comprendre les raisons des événements qui ont suivi. Certains éléments de continuité sont visibles dans les pratiques en cours, les enseignements dispensés, ainsi que dans les relations avec le tissu local et la bourgeoisie, qui avaient fait confiance à l’établissement pour éduquer leur descendance.

Les origines de cette institution remontent jusqu’aux jésuites.

Un travail d’historien

Cela n’est pas un travail d’historien, car je n’ai ni les compétences ni les ambitions. Je me suis basé principalement sur le livre de Jean-Marie Rosenstein, intitulé Histoire du lycée Arago 1808-2008, et je lui suis redevable de la majorité des données historiques. J’ai également utilisé la revue RICOCHET, publiée depuis des décennies par l’Amicale des Anciens d’Arago. Cela représente un défi pour moi et lorsque Madeleine Souche, présidente de l’APHPO, m’a posé la question de savoir si je connaissais quelqu’un susceptible de parler de l’histoire du lycée, je me suis fait l’écho de mes presque 40 années passées au sein de ses murs.

Témoignage sur un monde disparu

Je vous offre un témoignage direct de mon expérience, qui a commencé à l’âge de 6 ans et s’est terminée à 60 ans. Une période de 54 ans a vu disparaître un monde et émerger une nouvelle réalité souvent éloignée de l’ancienne. C’est une époque où les établissements scolaires, en particulier au second degré, ont subi des transformations majeures qui ont modifié leur fonction et leur nature : d’une école élitiste à un enseignement pour tous. Cette mutation était marquée par une forte demande d’éducation et des difficultés à saisir l’ampleur de ces changements. Une vague de démocratisation a été mise en place, avec ses hauts et ses bas.

Un changement significatif pour le lycée Arago

Une des grandes transformations pour le lycée Arago a été la suppression presque totale des locaux où ces changements s’effectuaient. J’ai été témoin de l’effondrement d’un monde autour de moi. Cela inclut les bâtiments abritant les classes de primaire, situés à l’emplacement actuel du quai de Lattre de Tassigny, qui ont dû être évacués suite à des dommages causés par des intempéries. Le vieux lycée a également connu une lente agonie, remplacé par un parking. Le transfert d’un bâtiment qui n’était jamais finalisé symbolisait la rupture totale entre l’ancien et le nouveau monde, bien que certaines continuités véhiculaient encore des liens entre les deux. Pour donner plus de précisions, je suis entré au lycée Arago en classe de 10e (équivalent du CE2) en 1950 et j’ai terminé en 2004 après une carrière d’enseignant au sein de l’établissement.

Les origines du XVIIe et XVIIIe siècles

L’enseignement secondaire à Perpignan s’est implanté dans un contexte de rivalité entre l’Université et les jésuites, avec l’Université fondée en 1349 en déclin au début du XVIIe siècle. À ce moment-là, elle ne comptait que trois chaires correspondant aux cursus du collège. Les jésuites espagnols, appelés par l’évêque Onofre Reart, s’établissent dans la ville avec l’intention d’ouvrir un collège, bien que les rivalités avec l’Université aient constitué un obstacle.

Conclusion

Nous avons vu un parcours enrichissant dans l’histoire du lycée Arago, des jésuites à la modernité. Ce témoignage souligne la manière dont cet établissement a évolué, de l’élite vers une institution plus accessible à tous, tout en portant en lui l’héritage de ses origines. La question se pose toujours, dans quelle mesure les principes jésuites et leurs méthodes influencent encore la pédagogie actuelle ?

Pour une bibliographie détaillée, veuillez consulter les travaux de RICOCHET, ainsi que l’ouvrage de Jean-Marie Rosenstein pour approfondir cette riche histoire.

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